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« À Voce Di Terra », Éléonore Pancrazi exhume les mélodies corses de Maurice Ravel

La chanteuse lyrique Éléonore Pancrazi, s’est penchée sur des partitions retrouvées de Maurice Ravel consacrées au patrimoine mélodique de l’île de Beauté. Un travail de jeunesse qui témoigne de l’attrait précoce du compositeur pour les cultures populaires.

Promesse du chant lyrique qui prendra en janvier le rôle-titre de Carmen à l’opéra royal de Versailles, la mezzo-soprano Éléonore Pancrazi connaît son Ravel sur le bout des doigts. Du compositeur basque elle a chanté nombre des mélodies, Chansons madécasses, mélodies hébraïques et grecques, le merveilleux cycle Shéhérazade dans une réduction pour piano (à quand sa version orchestrale ?) ou encore l’Heure espagnole, étonnante « comédie musicale » en un acte.

Quand, pendant l’épidémie de Covid et alors qu’elle monte par écrans interposés un programme autour de la voix lyrique et de la Corse, quelqu’un lui parle de manuscrits préservés à Corte que le jeune Maurice Ravel a consacrés à son île natale, c’est forcément la joie. « C’est son premier travail d’orchestration et d’arrangements, il a 20 ans à peine. On ne lui en connaît pas avant. On n’a que le manuscrit pour travailler, c’est un peu magique et ça procure une grande émotion. On sait par la suite qu’il va toujours être fasciné par la culture des autres », confie la chanteuse, qui s’est juré d’y revenir quand on lui donnera l’opportunité de publier un album sous son nom.

C’est chose faite grâce au label Oktav et au collectif de musiciens ActeSix, qui nous avait enthousiasmés il y a quelques mois avec un splendide Lieu à soi, promenade bucolique à travers le patrimoine mélodique britannique placée sous les auspices de Virginia Woolf. Il y eut bien une tentative d’enregistrer ces mélodies lors de la découverte des manuscrits, dans les années 1990, mais trop anecdotique et loin d’atteindre le travail de finition dont nous gratifie la chanteuse.

Savant mélange de couleurs instrumentales

L’histoire de ces partitions cachées commence à la fin du XIXe siècle avec Austin de Croze, régionaliste et ethnomusicologue de passage par la Corse pour son service militaire, décidé à parcourir l’île pour en collecter de façon orale les multiples chants et les retranscrire dans un volumineux ouvrage.

« Chaque chapitre correspond à un aspect de la culture corse et à un type de musique : politique avec les hymnes, chants satiriques et électoraux, l’amour, les berceuses, etc. On y apprend beaucoup sur la culture corse », atteste Éléonore Pancrazi.

Venu présenter le résultat de ses recherches à Paris, Croze demande à son jeune ami Maurice Ravel, fraîchement sorti du Conservatoire, d’en harmoniser et arranger une bonne douzaine. « En observant ce cycle, on comprend sa volonté de mélanger les instruments de musique de chambre avec ceux de la musique traditionnelle », remarque la chanteuse. On y trouve effectivement piano, orgue, harpe, harmonium, guitare et un quatuor à cordes, savant mélange de couleurs instrumentales dont ne se départira jamais le grand orchestrateur.

« On sent beaucoup de respect, de subtilité et de raffinement, avec un côté chambriste auquel on ne s’attend pas. C’est très simple mais rien n’est laissé au hasard. C’est de la dentelle. » De quoi laisser entrevoir l’empreinte permanente que les musiques populaires laisseront sur son œuvre future. « J’aime à penser que c’est ce cycle qui lui a donné cette passion », veut-elle croire. Et nous avec.

À Voce Di Terra, Éléonore Pancrazi, ActeSix, Oktav Records.

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